La vallée de l’Arve est à l’avant poste en matière de lutte contre la pollution de l’air. Pourtant, il y a un parent pauvre de ce « statut » : Cluses. Alors qu’elle est, après Annemasse, la seconde ville en termes d’habitants dans la vallée (17 059 habitants), elle n’a aucune station de mesure de la qualité de l’air !
La vallée de l’Arve détient un nombre élevé de stations de mesure de la qualité de l’air, au-delà même du niveau réglementaire imposé par l’Union Européenne. Cela est une bonne chose. Mais à regarder de plus près, il y a un décalage.
Il y a 10 stations de mesure de la qualité de l’air dans la vallée, dont une grand majorité est concentrée dans le haut de la vallée (entre Sallanches et Chamonix). Cela est tout à fait logique du fait de la topographie et des vents qui font remonter toutes les particules fines vers cet endroit de la vallée.
Il y avait une station de mesure des PM 10 et du très dangereux Benzo(a)pyrène à Marnaz dans le cadre d’une étude ciblée. Depuis 2015 et 2017, cette station ne mesure plus ni les Benzo(a)pyrène ni les PM 10.
Malheureusement, par manque de moyens humains et financiers, ATMO se repose sur une méthode de modélisation pour établir le niveau de qualité de l’air.
Cette modélisation s’effectue par une étude moyenne des relevés de la station existante à Annemasse, en tenant compte, ensuite, d’autres facteurs spécifiques à Cluses (topographie, état des bâtiments, etc) et des anciennes études ciblées (comme à Marnaz).
Mais comme le remarque le second plan de protection de l’atmosphère à la page 131 :
Malgré les progrès importants réalisés en modélisation de la dispersion atmosphérique en termes de recherche sur le transport et la chimie ces dernières années, il existe encore de nombreuses difficultés liées à la représentation en vallée alpine. (…) La modélisation proposée par Atmo Auvergne-Rhône-Alpes dans le cadre de cette évaluation est donc à prendre en compte avec les incertitudes qui s’y rapportent.
Sans station de mesure, l’évaluation de la qualité de l’air dans le bassin de Cluses relève donc d’une approximation.
Une station de mesure coûte au plus bas 30 000 euros, ce à quoi il faut évidemment ajouter le coût d’analyse des résultats et les frais d’entretien régulier. Pour comparaison, le nouveau « technocentre » du décolletage à Cluses a coûté 12 millions d’euros.
On vit dans un pays d’un haut niveau technologique, disposant de vastes richesses mais incapable d’installer une simple station de mesure de l’air à Cluses. Cela est profondément injuste et anti-démocratique.
D’ailleurs, à propos des suspicions à l’égard, entre autres, des rejets d’ « Hacer surface » les autorités affirment que ces derniers sont en majorité de la vapeur d’eau. Pour le reste, l’usine respecterait les normes en vigueur, du fait de son statut d’ « installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) » impliquant une auto-déclaration annuelle de ses émissions polluantes.
Or, tout le monde sait bien qu’une entreprise privée vise surtout à augmenter ses profits. Tout ce qui augmente les coûts de production sans élever les bénéfices net est vu comme une « charge » superflue.
Aussi, comme cela a été montré à Fos-sur-Mer, les entreprises savent très bien maquiller leurs résultats par la corruption des techniciens en charge de ces auto-contrôles. Et quand il faut tout de même rénover des installations, l’argent est pris dans la poche de la population, comme avec l’octroi d’aides par le « Fonds Air Industrie ».
Par conséquent, toute démarche démocratique pour la qualité de l’air dans le bassin de Cluses doit passer en premier lieu par l’installation d’une station de mesure multi-polluants, sans quoi rien n’est vraiment envisageable.