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Station de mesure de la pollution à Cluses : un coup d’épée dans l’eau ?

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Avec le concours de la « Communauté de Communes Cluses Arve & Montagnes », l’association ATMO Rhône-Alpes agréée par l’Etat pour surveiller la qualité de l’air, a installé une station de mesure des particules fines au niveau des jardins partagés du quartier de Messy.

L’emplacement de cette station est idéal, dans une zone exposée à la fois aux fumées d’Hacer, à la circulation autoroutière et aux fumées de cheminée des maisons du quartier de Messy. Elle se trouve également dans la zone de stagnation des émissions de particules de tout le bassin repoussées vers la cluse.

Il ne faut toutefois pas se laisser aveugler : si nous avons toujours demandé une station de mesure multi-polluants, que va mesurer et contrôler cette station ? 

1) Une station qui mesure seulement les PM10

La station de mesure se concentre uniquement sur le relevé de la masse des plus grosses particules fines (les PM 10 ou particules fines égales ou inférieures à 10 microns).

Relever seulement les PM 10 est une approche insuffisante au regard des avancées scientifiques. ATMO sait que ce sont les PM2,5 et les PUF qui sont les plus nocives car plus petites elles pénètrent dans tout l’organisme. Relever la quantité de PM10 ne permet pas de savoir la part exacte des particules les plus fines dans la pollution.

En janvier 2021, l’ATMO lance d’ailleurs un nouvel indice IQA pour prendre en compte les PM2.5 dans les alertes pollution. Pour comprendre, lire cet article: Un nouvel indice ATMO plus clair et précis.

Alors pourquoi seulement une station de mesure des PM 10 à Cluses ? Cela est insuffisant et périmé.

2) … Pour contrôler sur un an la validité des modélisations de la qualité de l’air

Jusqu’à maintenant, il existait des informations sur la pollution à Cluses, mais elle résulte d’une modélisation informatique tenant compte de plusieurs facteurs (comme le vent par exemple) et se basant sur les relevés de la station de Passy et de celle à Annemasse-Gaillard.

L’installation d’une station est donc temporaire et vise surtout à ce que l’ATMO vérifie la fiabilité de sa modélisation de la pollution dans le bassin de Cluses. Il n’y a pas de volontés de creuser en profondeur les sources de pollution, ni même leurs dynamiques.

Au-delà de la quantité de PM10 dans l’air, nous avons besoin de savoir la nature et la nocivité des polluants, afin de mieux en situer les sources. Pour cela il faut une station permanente qui approfondisse les spécificités de la pollution à Cluses.

3) Pour une station de mesure multi-polluants !

Pour être pertinente, le premier critère de l’installation d’une station de mesure serait d’être un capteur multi-polluant qui mesurerait les PM10, les PM2.5, les NOx (trafic routier) et devrait dans l’idéal s’accompagner de recherches approfondies sur les métaux lourds pour lesquels l’usine Hacer est surveillée et les émissions de Composés Organiques volatiles (COV) pour lesquels l’industrie di décolletage est connue.

Sans mesure des PM 2,5, des PUF, ni même des métaux lourds et des COV, on se demande bien finalement ce que l’on va apprendre de plus sur la pollution locale…

4) Pour une station disposant des meilleures avancées technologiques !

A Lyon, ATMO dispose des meilleurs outils technologiques pour évaluer l’ensemble du spectre (quantitatif et qualitatif) de pollution. Il existe notamment un outil qui permet d’affiner les connaissances comme le montre ce graphique des sources du pics aux particules fines de la fin novembre :

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Pourquoi la vallée de l’Arve, beaucoup plus soumise à des pics de pollution ainsi qu’à la pollution chronique, ne bénéfice t-elle pas de ces outils ? Alors oui, la vallée a beaucoup de stations de mesure, mais celles-ci sont surtout en haut de vallée. Le bassin de Cluses est le parent pauvre alors même que « Santé Publique France » montrait en 2017 que la pollution aux PM2,5 y était plus élevée.

De quelle démocratie parlons-nous lorsque l’on vit dans une vallée si riche (suisse voisine, décolletage, tourisme…) et si polluée, sans que cette richesse n’aide à améliorer la qualité de l’air (que l’on pense ici aux outils scientifiques, mais aussi aux transports en commun…) ?

Ce n’est pas l’argent qui manque, ni la volonté de connaissance des membres de l’ATMO, mais belle et bien une volonté politique capable d’aller chercher l’argent. Il ne faut pas ici se faire d’illusions : pour avoir ces moyens financiers, il faut établir un rapport de forces pour contraindre les personnes qui privatisent les richesses.

En conclusion, les insuffisances de cette station révèlent que le problème se situe au niveau de l’Etat qui accrédite ATMO pour qu’elle surveille et produise de la connaissance sur la qualité de l’air, sans pour autant lui fournir les ressources conséquentes. Le bassin de Cluses est dépourvu, de manière injuste et inégalitaire, de ce qu’il est pourtant en droit d’attendre.

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